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  • Présentation d'artistes contemporains et anciens du Japon.Photographes,peintres,estampes.Kimono ancien et créations inspirées des kimonos traditionnels.Passion du Japon et des arts . 日本の文化の芸術の情熱。
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15 janvier 2023

Kumano-Kodo chemins millenaires

Mandala-_Pilgrims_at_Nachi_Shrine,_Muromachi,_Honolulu_Museum_of_Art copie

Pelerinage de l'empereur retire Gotoba , XVeme siecle, universite d'Honolulu.

 

 

En dépit de son caractère ascétique,le pelerinage de Kumano fut l'objet d'un engouement presque frénétique de la part des empereurs retirés pendant la périodeeponyme, insei (1086-1221). Le quatrième pèlerinage impérial de l'empereur retiré Gotoba, effectué en 1201 et chronique par Fujiwara Teika dans son journal Meigetsuki. La minutie des descriptions, le regard quelque peu éloigné que porte Teika sur le voyage vers Kumano du fait de sa fonction de préposé aux offrandes impériales font de ce document une des sources majeures pour appréhender cette importante pratique religieuse, à cheval entre la fin de l'Époque Ancienne et le début du Moyen Âge.

 

À l'âge de vingt-deux ans, la dixième lune de la première année de l'ère Kennin (1201), l'empereur retiré Gotoba  (1180-1239 ; 1198-1221) part pour la quatrième fois en pèlerinage pour les trois sanctuaires de Kumano, Kumano-sanzan , situés dans la partie méridionale de la péninsule de Kii (actuelle Wakayama) Il s'agit de Shingû  à l'embouchure de ce fleuve ; et de Nachi  plus au sud, à une dizaine de kilomètres, quelque peu à l'intérieur des terres. Kumano, depuis le VIIe siècle et tout au long de la période de Heian (794-1185), est un lieu de pratiques ascétiques de nombreux religieux et thaumaturges qui, au terme de longues mortifications, ont la réputation de posséder des pouvoirs extraordinaires. C'est aussi l'un des creusets du syncrétisme shintô- bouddhique qui domine toute la pensée religieuse, à partir du XIe .

L'empereur est accompagné d'une  suite de hauts dignitaires et de courtisans, hommes d'armes, danseurs et musiciens, moines et religieux de tous rangs. Parmi eux, Fujiwara Teika .

Depuis la capitale, il faut vingt-deux jours de voyage, le passage d'une dizaine de cols — dont deux à plus de huit cents mètres d'altitude — et de six rivières, pour couvrir les sept cents kilomètres du chemin. Une fois rendus à l'oratoire de Kubotsu , à Ôsaka, véritable point de départ du pèlerinage, les pèlerins poursuivent leur route par la route de Ki  jusqu'à Tanabe, dans le district de Muro, en longeant la côte ouest de la péninsule de Kii. Ici, ils entrent en montagne et gagnent Hongû par le chemin de Nakahechi puis rejoignent Shingû et Nachi, avant de regagner Hongû pour prendre à nouveau la route de Nakahechi et de Ki en sens inverse.

 

kumano_dai

 

Les chemins de Shikoku sont parmi les plus populaires au Japon comme à l’étranger et il existe plusieurs publications en français sur ce chemin de plus de mille kilomètres dans la petite ile du sud du Japon.
 Un autre pèlerinage plus ancien (2000 ans, règne de l’empereur Sujin)  et dont les caractéristiques sont plus proches de Saint-Jacques de Compostelle  existe depuis aussi longtemps: Kumano-Kodo, littéralement le ‘’ vieux chemin de Kumano’’.
En haut de la longue côte orientale de la péninsule de Kii (140 km), qui s'étend du cap Shio et Kushimoto au sud à la presqu'île de Shima  au nord-est, une anse allongée s'ouvre sur la mer de Kumano , seuil de l'océan Pacifique.En 2003 ce pèlerinage est jumelé avec Compostelle et comme ce dernier ses voies sont multiples et son histoire suit l’évolution de la société japonaise. Il est cependant beaucoup moins fréquente et l`on peut faire de nombreux kilomètres sans rencontrer personne.

Carte de kumanokodo chemin imperial

 

 

L'engouement de tant de pèlerins aussi honorables valide l'authenticité et l'existence de la puissance magico-religieuse de Kumano. Ainsi, la pratique du pèlerinage à Kumano s'étendit rapidement à l'ensemble de la noblesse, aux classes moyennes puis aux gouverneurs de province, et plus tard au peuple, au point qu'on parlera du fourmillement des pèlerins vers Kumano . On évoque bien de faux dévots qui se rendent à Kumano par imitation, pour suivre le mouvementgénéral, témoignage du conformisme craintif de l'aristocratie face à l'absolutisme des empereurs retirés. Cependant, un simple mimétisme social ne peut expliquer la fréquence des pèlerinages des empereurs retirés ainsi que de nombreux dignitaires, les remises importantes de terres aux sanctuaires de Kumano et surtout, le choix d'un lieu d'accès aussi difficile.

Quatre-vingt un oratoires, sortes de bornes-relais sont disposées sur l'intégralité du chemin tous les trois ou quatre kilomètres. L'existence de ces ôji est l'une des grandes caractéristiques du pèlerinage à Kumano ; on ne trouve pas leur équivalent dans le cadre des pèlerinages au mont Kinbusen (ou Kinpusen) de Yoshino ni a Koyasan.

 

L'oratoire de Hosshin-mon marque une étape dans le déroulement du pèlerinage. Traditionnellement, ce lieu doté d'un portail sacré, torii , est considéré comme l'ultime seuil de la terre pure du bouddha Amida. Cette porte clôture un espace qui commence à Takijiri, où le pèlerin franchit un premier portail. De là, le mouvement qu'il amorce vers le sanctuaire de Hongû équivaut au

franchissement symbolique des neuf échelons du royaume d'Amida (kuhon-jôdo) où renaissent les hommes selon leur karma. Ainsi, ce principe abstrait et lointain de la terre pure, alourdi de la notion de rétribution, est projeté au cœur de la géographie de Kumano, sur la sente de Nakaheji, et le mouvement qu'effectue le pèlerin dans l'espace doit se lire comme la mise en scène de l'odyssée de l'âme vers les domaines mortifères après le trépas.

De plus, le nom de Hosshin-mon fait allusion à l'une des quatre portes existant dans les mandata du bouddhisme ésotérique Shingon du plan de la matrice et du plan du diamant, quatre portes signifiant la progression de l'ascète vers l'état de parfait éveil45.

Teika précise : « La grande majorité des gens a laissé sa trace à chaque oratoire », une pratique sans doute courante lors des pèlerinages. Le rouleau peint retraçant la vie du moine poète Saigyô le Saigyô monogatari emaki, représente ce dernier sur le chemin de Kumano le pinceau à la main, en train d'écrire sur l'enceinte de l'oratoire de Yagami .

 

En 2014 je marchait depuis plusieurs jours et c'est l'endroit dont je me souviens le plus precisement.Il y regne une atmosphere indicible.

 

 Une longue descente  mène au croisement avec le sentier Akagi-goe, qui lui se dirige vers Yunomine Onsen. Hosshinmon-oji se situe ~ 25 minutes de marche après.Il n’y a pas d’hébergement à Hosshinmon-oji. Plusieurs hébergements sont par contre disponibles à Hongu, Kawayu Onsen et Yunomine Onsen.

 

Poeme du Moine Saigyo a Hoshimon Ooji :

 

Au milieu des nuages, la terre pure de l'Ouest [du bouddha Amida] vers laquelle l'âme se dirige.

Ce passage abrupt de la sublime Loi [du bouddha], aujourd'hui même je lefranchis.

Désormais, je ne tomberai plus dans les six voies([inférieures de réincarnation)

(Mutsu no michi  rokudô : voie des enfers, des esprits faméliques, des animaux, des esprits guerriers ashura, des hommes et des dieux).

 

Vingt ans avant que Gotoba ne précipite ses troupes contre celles du Bakufu, dans la guerre fatale de l'ère Jôkyû (1221), le texte rédigé par Teika permet de s'insinuer dans l'intimité d'un exercice bien « rodé » de la période Insei, la croisée du rituel social et de l'ascèse personnelle. On le sait, même pratiqué dans la plus grande solitude, le pèlerinage reste un acte social, par la reconnaissance de certains lieux, d'un itinéraire, d'une théologie qui manifeste une conscience collective et cristallise les attentes de la société. Mais dans le cas de Kumano, on remarque combien le pèlerinage est une transposition de la société, de sa hiérarchie, de ses modes de vie et de ses coutumes. À ce titre, Moerman fait remarquer combien les conclusions de Turner (1978, p. 250), pour qui le pèlerinage est « un phénomène liminaire qui conjugue les caractéristiques de modestie, de sacralité, d'homogénéité et de camaraderie », ne s'appliquent pas aux pèlerinages impériaux à Kumano ; « l'inverse semble vrai — poursuit Moerman (1997, p. 350) — les pèlerinages à Kumano

servent renforcer plutôt qu'à dissoudre les distinctions sociales, ils ne représentent pas la négation du pouvoir et de la force, mais leur

articulation ».

BROTONS Arnaud, Kumano-môde no jissen to Kumano no hyôshô to no kakawari (Sur les liens entre la pratique du pèlerinage à Kumano et les représentations de Kumano), in Shûkyô minzoku kenkyû , vol. 10, Université d'Ôtani , Kyoto, 2000, pp. 93-113.

 

 

 

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